Actualité, Divers

J’ai rêvé à elle, cette nuit…

Marie-Pierre BarathonJ’ai rêvé à elle, cette nuit…

Elle était assise sur un banc de parc. Sur ses lèvres, un sourire à la Mona Lisa. Elle observait sereinement les alentours. Elle attendait que la Mort vienne la chercher tandis qu’autour d’elle s’agitait doucement la Vie. Les oiseaux sifflaient. Les promeneurs foulaient l’herbe verte avec nonchalance ou encore s’y prélassaient. Les enfants, un peu plus loin, jouaient au ballon.

Quand, vers la fin de l’après-midi, les gens ont déserté le parc, je me suis retournée vers elle.

Le banc était vide.

Elle y avait laissé sa veste de laine et quelques effets personnels.

J’ai regardé devant, et j’ai vu l’eau de la rivière qui, doucement, suivait son cours.

J’ai compris qu’elle nous avait quitté.

Elle n’avait pas eu la patience d’attendre…

J’ai récupéré ses affaires pour les rendre à qui de droit.

J’ai pleuré en réalisant que ce lainage que je portais au bras, et qui portait son parfum, resterait vide à jamais.

Marie-Pierre Barathon n’était pas une amie proche. Et pourtant, c’est avec émotion que j’appris hier soir la triste nouvelle de son décès. Pendant un an, j’ai travaillé avec elle le manuscrit d’un roman qui, finalement, n’a pas été publié. Je l’ai rangé depuis dans le fond de mes tiroirs pour mieux y revenir plus tard.

Je me souviendrai toujours de cette sensibilité et cette intelligence qui étaient siennes. Nous étions elle et moi sur une même longueur d’ondes. Elle avait si bien saisi ce que je souhaitais faire de ce roman dont le sujet, sensible, me donnait beaucoup de fil à retordre. Je ne parvenais pas à prendre le recul nécessaire. Je n’y voyais plus clair. Elle savait. Ce n’était pas une affaire de fiction. Elle n’a pas posé la question. Elle comprenait. Il fallait le travailler, ce texte. Elle y croyait.

Je n’avais jamais senti encore une telle complicité féminine dans l’écriture.

Pendant des mois, nos longues conversations téléphoniques au sujet des différentes versions que je lui faisais parvenir ont fait beaucoup progresser ma réflexion.

J’avais hâte de lui faire lire bientôt le nouveau manuscrit sur lequel je planche. Son avis sur celui-ci, dont le défi m’apparaît semblable au précédent, m’importait beaucoup. J’aurais tant aimé travailler encore une fois avec elle.

Hélas…

Par défaut
Actualité, Mode de vie, Réflexion

La littérature comme manière de vivre

Capture d’écran, le 2019-02-15 à 21.36.17

« …l’une des motivations fondamentales de l’écriture consiste à vouloir donner forme à l’informe, à clarifier ce qui est confus en soi : magma de perceptions diffuses, émotions enfouies, idées en vrac, entrelacs de souvenirs. Jean-Jacques Rousseau, dans le Manuscrit de Neufchâtel, précise ainsi vouloir «débrouiller ce chaos immense de sentiments si divers, si contradictoires» dont il fut agité toute sa vie. Les Confessions, l’une des premières entreprises autobiographiques moderne, se trouve ainsi justifiée. L’écriture joue ici à l’évidence une fonction cathartique… Elle aide à faire le point, à prendre du recul ; elle est l’instrument qui permet de mettre en mot une expérience que le langage oral, usé et approximatif, peine à dire. »

Tiré de : La littérature comme manière de vivre, Sciences Humaines

Par défaut
Actualité

Hier soir, il s’est éteint

Downie se donne à fond; il se dandine devant le micro, le torse raide comme un robot, avec des gestes scandés. Il ferme parfois les yeux, comme pour mieux habiter ses chansons. De temps à autre, il empoigne le mouchoir glissé dans la poche de son pantalon, et éponge son crâne rasé où perle la sueur. Un large cerne noirâtre se déploie au dos de sa chemise.

Sur le parterre, les adeptes ponctuent le rythme en frappant de leurs mains élevées dans les airs. Le chanteur tend la main à quelques privilégiés qui lui frôlent le bout des doigts. Des sifflements et des hurlements réclament un rappel, puis le spectacle se termine.

Extrait de L’Amour n’est rien, Éditions les 400 coups.

gordon-downie

Par défaut